Lettre ouverte de SUD Éducation à la FSU

Saint Denis, le 28 janvier 2011 Lettre ouverte de SUD éducation à la FSU : Dans quelle stratégie la grève du 10 février s’inscrit-elle ?
mercredi 2 février 2011
par  julien
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Cher-e-s camarades, Nous avons bien pris connaissance de votre proposition d’une journée de grève dans l’Éducation appelée par la FSU dans toute la France qui aura lieu le 10 février d’après le communiqué national de votre organisation.

Nous regrettons que la fédération SUD Éducation n’ait pas été invitée aux réunions intersyndicales que vous avez organisées la semaine dernière et cette semaine.

Nous avons eu très tardivement connaissance de cette proposition de grève, et nous n’avons à ce jour pas de mandat de nos syndicats sur la participation de la fédération SUD Éducation à celle-ci. Aussi, afin que nos adhérent-e-s et nos syndicats puissent décider en connaissance de cause, nous aimerions avoir les réponses à quelques questions.

Nous partageons bien entendu l’exigence d’une autre politique éducative qui motive votre appel à la grève, et notamment le refus des suppressions de postes et la nécessité d’un autre budget ; nous refusons les contre-réformes gouvernementales et pour notre part nous en revendiquons l’abrogation (mastérisation, programmes du primaire, aide personnalisée, suppression des RASED, réformes des lycées généraux, technologiques et professionnels et bac pro 3 ans, dispositif (E)CLAIR, primes au mérite, individualisation des rémunérations…) ; nous revendiquons l’arrêt du recrutement de précaires et la titularisation de tou-te-s les précaires. Les raisons d’une mobilisation d’ampleur pour le service public d’éducation ne manquent pas !

Par ailleurs, vous nous connaissez, nous ne tiendrons jamais un discours anti-grève, car nous pensons que la grève est un instrument majeur des salarié-e-s dans leurs combats revendicatifs. Mais encore faut-il pour cela qu’elle ne soit pas dévaluée, et qu’elle aille jusqu’au bout de sa logique de blocage pour être efficace.

Car telle est bien la question qui nous taraude avec votre appel à une journée de grève le 10 février, celle de l’efficacité. Autrement dit, cette grève, c’est pour quoi faire ? Qu’en ferez-vous ensuite, dans l’hypothèse où elle serait suffisamment suivie ? Que proposerez-vous aux salarié-e-s de notre secteur pour espérer gagner ?

Car vous en conviendrez aisément, personne ne peut avoir l’illusion que nous pourrions faire céder le gouvernement sur le noyau dur de ses contre-réformes ou sur sa politique de suppression de postes avec une grève d’un jour, même très largement suivie, ni même avec des journées d’action isolées, quelles qu’en soient les formes.

Cela ne signifie pas que nous refusons par principe tout appel à la grève pour une journée : des journées d’action peuvent servir à la construction d’une mobilisation d’ampleur, elles peuvent contribuer à la création d’un rapport de force pour pouvoir passer à d’autres types d’actions, plus fortes. Mais il faut pour cela qu’elles s’inscrivent dans une stratégie qui soit à la fois une stratégie pour gagner sur les revendications des personnels et une stratégie lisible et ouverte pour qu’elle puisse être appropriée et débattue largement par nos collègues, syndiqué-e-s ou non.

Pour être clair, nous nous posons des questions sur l’intérêt qu’il y aurait à participer à une grève le 10 février si c’est uniquement pour témoigner de notre refus de la politique éducative du pouvoir en place : il est au courant, il sait que ses réformes sont rejetées, et il s’en moque. La manière dont il a imposé la réforme des retraites le prouve : pour espérer gagner, il faut un rapport de force de très haut niveau. Ni l’indispensable soutien de l’opinion populaire, ni des manifestations à répétition, même massives, n’y suffiront.

Pour le moment, la seule perspective après le 10 février, ce serait le samedi 19 mars, avec une journée nationale de manifestation. Et après ? Une nouvelle journée d’action en avril ou en mai, et ensuite on nous expliquera que les examens approchant, il faut préparer une rentrée offensive (ce qui ne voudra surtout pas dire qu’il y aura un appel à la grève reconductible à la rentrée) ? Si tel est bien l’horizon, nous voilà reparti-e-s pour le rythme traditionnel des journées d’actions tous les mois ou deux, dont l’expérience de ces dernières années a montré l’inefficacité. Autant dire que cela suscite en nous une certaine lassitude…

En 2003, il ne fallait surtout pas toucher au bac. Cet automne, seul Solidaires a appelé clairement les collègues à la grève reconductible et a soutenu les grévistes qui reconduisaient la grève. Construire un rapport de force avec des journées d’action, soit, mais si c’est pour reculer lorsque le bras de fer est engagé, on peut se demander « à quoi bon ? ».

Bien entendu, rien ne garantit que les collègues s’inscriront dans des propositions syndicales, quelles qu’elles soient. Mais les organisations syndicales ont la responsabilité de leur proposer des modes d’actions à la hauteur des enjeux. Celles qui refusent que les assemblées générales de personnels soient souveraines ont encore plus de responsabilité. Et quand elles sont majoritaires…

Les collègues qui participeront à la grève du 10 le feront pour des revendications légitimes. La position de notre organisation syndicale n’est pas encore tranchée. Nous préférons être du côté de celles et ceux qui se mobilisent. Mais après le mouvement de cet automne, après les échecs des années passées, il nous semble difficile de convaincre les collègues de s’engager massivement dans l’action sans perspective claire, et encore plus par la grève, avec le retrait de salaire qu’elle implique. Il ne suffit pas d’un « plan d’actions » : il nous faut une stratégie susceptible d’être gagnante.

Afin que nos adhérent-e-s et nos syndicats puissent débattre de votre proposition de manière informée, nous vous demandons donc, cher-e-s camarades, de bien vouloir nous indiquer dans quelle stratégie cette grève du 10 février s’inscrit, quelles suites vous comptez proposer aux personnels.

En espérant une réponse écrite de votre part, que nous pourrions communiquer à nos adhérent-e-s et à nos syndicats et, si vous en êtes d’accord, plus largement aux personnels, nous vous remercions de bien vouloir nous transmettre cette réponse au plus tôt.


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