Le gouvernement vient de rendre public un Document d’orientation sur la réforme des retraites. Sous prétexte de vouloir défendre notre régime de retraite, il en poursuit la destruction, s’inscrivant explicitement dans la lignée des contre-réformes antérieures de 1993, 2003 et 2007-2008, alors même que celles-ci ont entraîné en moyenne une baisse de 20 % du niveau des pensions.
Le gouvernement assure vouloir « continuer à faire de la répartition le pilier du système français de retraite ». Cela ne l’empêche pas de vouloir développer la capitalisation en encourageant l’épargneretraite, alors même que cela entraînera un dépérissement des ressources de la répartition, un bon rendement de la capitalisation supposant, de fait, une compression de la masse salariale.
Le gouvernement nie le rôle de la crise dans l’aggravation des déficits actuels alors même que le Conseil d’orientation des retraites (COR) indique dans son rapport d’avril 2010 que « la dégradation très rapide des comptes en 2009-2010 s’explique principalement par la crise économique qui réduit fortement les revenus d’activité ». Il ne voit comme solution que de s’attaquer à l’âge légal de départ à la retraite et d’augmenter encore la durée de cotisation, même si cela entraînera, comme par le passé, une nouvelle baisse du niveau des pensions et qu’il reconnaît que ces solutions auront des conséquences sociales dommageables.
Il continue donc à se focaliser sur l’emploi des seniors et « oublie » qu’en France, le taux d’activité des femmes est inférieur à celui de la majorité des pays de l’Union européenne.
Un taux égal d’emploi des femmes et des hommes permettrait de ramener en 2050 le ratio de dépendance économique (personnes hors emploi/personnes en emploi) à la valeur qu’il avait en 1970. Des politiques publiques adaptées, notamment en matière de prise en charge de la petite enfance, seraient efficaces pour améliorer le taux d’emploi des femmes.
Il refuse toute augmentation des cotisations patronales au motif que cela pèserait sur l’emploi. Le fait qu’en 2009 les entreprises du CAC 40 aient distribué 75 % de leurs profits sous forme de dividendes n’attire pas la même critique quant à l’emploi. Selon le scénario du COR le plus défavorable, il faudrait, pour financer les retraites à l’horizon 2050, une augmentation de 10,4 points de cotisations qui, lissée sur 40 ans, correspond à 0,26 point par an. Une augmentation des cotisations patronales aurait des effets neutres sur la sacro-sainte compétitivité des entreprises, et donc sur l’emploi, si elle était compensée par une baisse des dividendes versés aux actionnaires qui ont explosé ces dernières décennies.
Les ressources supplémentaires envisagées avec une contribution sur les hauts revenus et les revenus du capital seront affectées au fonds de solidarité vieillesse pour financer les mécanismes de solidarité des régimes de retraites que le gouvernement veut d’ailleurs « adapter ». Cette contribution sera donc limitée et n’empêchera pas que le poids de l’ajustement des régimes de retraites soit supporté essentiellement par les salariés.
Le gouvernement endosse la conception patronale de la pénibilité qui reposerait sur un constat individuel a posteriori et non pas sur une définition a priori des métiers et catégories professionnelles. Le risque est grand de vider la notion même de pénibilité au travail de tout contenu.
Au nom de l’équité, les régimes du secteur public seront remis en cause, alors que, malgré des modes de calcul différents, les retraites dans le privé et le public sont, à qualification égale, équivalentes.
Pour l’Union syndicale Solidaires, de telles orientations sont inacceptables. Elles justifient l’appel à la journée unitaire de grèves et de manifestations le 27 mai. Au-delà, c’est à un affrontement déterminé avec le gouvernement qu’il faut se préparer.
Le 17 mai 2010
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