Lycée : une réforme allégée mais qui reste dangereuse pour les élèves et les personnels

lundi 9 novembre 2009
par  sudeducationalsace
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La Com’ élyséenne aura beau dire, elle n’échappera pas à une cruelle réalité : les lycéens ont eu la peau de la grande réforme du lycée voulue par Nicolas Sarkozy. Ce qui explique le projet présenté le 13 octobre, qui reprend certaines des préconisations du rapport remis en juillet par R. Descoings, le directeur de Sciences Po Paris.
 
 

Le contexte de l’annonce Sarkozy-Chatel

Comme tous les services publics, ainsi qu’en témoignent les tentatives de privatisation de la Poste et de la Santé, l’école est victime d’attaques de plus en plus violentes : réduction drastique des dépenses, flexibilisation du statut des personnels. La mastérisation participe de cette évolution en appauvrissant les contenus disciplinaires et en rendant plus difficile l’accès à la profession d’enseignant pour les plus modestes.

Le projet Darcos était articulé autour d’un socle commun et d’enseignements réduits. On est loin désormais de la grande réforme voulue en début de quinquennat. Mais attention, l’Élysée prévoit déjà de toucher aux « enseignements du cycle terminal » d’ici 2011. Jouera-t-on sur le levier des contenus et/ou des horaires pour entrer dans le cadre des 80000 suppressions déjà engagées ?

Luc Châtel devrait préciser le contenu de la réforme devant une sélection d’organisations syndicales dont nous sommes pour l’instant exclus en dépit de nos résultats électoraux. Inutile de toute façon de compter sur une quelconque négociation, le projet devant être présenté définitivement pour la fin de l’année. En attendant, que sait-on ?

La réforme en 6 points et nos commentaires

  • Le « droit à l’erreur » et à la « réorientation » en cours de route. Pourquoi pas ? Mais comment croire aux stages passerelles lorsqu’on supprime les classes passerelles entre filières générales et technologiques ? Comment croire à une orientation « moins subie » alors qu’on remet en cause le service public d’orientation au profit de plates-formes multimédia. Elles se substitueront aux COP, formés, spécialisés et intervenant toute l’année scolaire dans les établissements. Comment ne pas craindre qu’une orientation en cours d’année soit utilisée pour aggraver le tri social ? Comment croire à des stages de remise à niveau en heures sup pour les profs et les élèves ? Nous craignons un système plus élitiste, destiné surtout à éviter le coût du redoublement…
  • Les liens avec le supérieur et les entreprises. Si on peut discuter de la pertinence du premier lien, le second est particulièrement inquiétant : banque de stages en entreprises par lycée, stages d’enseignants en entreprises. Partenariats et financements privés ne feront qu’accroître les inégalités de traitement entre lycées et filières d’un même établissement. Surtout l’école doit demeurer indépendante de la sphère privée libérale.
  • Avec la revalorisation des baccalauréats technologiques et littéraire — ce dernier ambitionnant une visée internationale avec un apprentissage accru des langues étrangères — on prétend rééquilibrer les filières. Mais comment y parvenir sans penser l’articulation avec le supérieur qui laisse peu de débouchés à ces filières au contraire de la série S ? Quelles réflexions sur la cohérence de cette filière avec l’introduction du Droit et d’un enseignement de la culture ?
  • L’accompagnement personnalisé de 2h. Il existe déjà dans les lycées à travers les heures de module et d’aide individualisée. Le contenu très hétéroclite de ces séquences (soutien ou d’approfondissement, orientation) est totalement déconnecté des cours eux mêmes… Enfin sur quels enseignements ces moyens vont ils être pris ? Le président réforme en effet à « moyen constant »… c’est-à-dire avec encore 16 000 postes en moins l’an prochain !
  • Le ministère annonce un renforcement de l’apprentissage des langues étrangères, particulièrement l’anglais, qui doit correspondre à des épreuves laissant plus de place à l’oral. Mais l’apparition de « groupes de compétences » risque de constituer de nouvelles « classes de niveau ». Par ailleurs, aucun allégement des groupes de langues, aucun plan d’équipement ne sont prévus et l’État compte sur les Régions pour aider les familles défavorisées à financer des voyages…
  • La place de la culture et de l’art dans les lycées. On prétend valoriser et développer l’éducation artistique, la musique, l’art ou le théâtre, sans aucun moyen supplémentaire. Au contraire, ils sont actuellement diminués pour les projets de ce type. Une réduction d’horaire et/ou des programmes de français, histoire et sciences sera nécessaire pour ménager une place à cet enseignement transversal d’histoire des arts qui doit être évalué au bac.

Le Bilan

Sud éducation ne se retrouve pas dans ce lycée « pour chacun » qui tourne le dos au « droit à l’éducation pour tous » : rien pour atteindre les objectifs affichés de lutte contre les inégalités sociales au lycée, pour s’attaquer à la hiérarchie des filières et démocratiser le système, rien sur la nécessité de baisser des effectifs souvent pléthoriques ou de multiplier les travaux en petits groupes, aucune réflexion sur les contenus d’enseignement et l’organisation de la scolarité. Au contraire, le projet agrège des gadgets dangereux : livret de compétences, stages de remise à niveau pendant les vacances, liens avec les entreprises...

Avec la très grande majorité des personnels, Sud éducation considère que la démocratisation du lycée nécessite la restitution des postes supprimés depuis 3 ans. Globalement, aucune convergence n’est possible avec le gouvernement dont les réformes constituent un habillage de la poursuite des suppressions de postes, de la fragilisation constante des statuts et de la multiplication des situations de travail précaire. Nous refusons une Éducation nationale qui abandonne sa mission de service public en déléguant hors de l’école ce qu’elle doit assurer pour tous.

Commission Fédérale Sud Education Second degré

 

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