Projet de loi sur l’autonomie des universités : déclaration de la Fédération SUD Education

samedi 30 juin 2007
par  sudeducationalsace
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Déclaration faite par la Fédération des syndicats Sud Education sur le projet de loi de réforme des Universités, à l’occasion de l’audience du 26 juin 2007 avec M. Sarkozy.

 

"Si nous sommes présents ici c’est d’abord pour vous dire notre totale opposition au projet de loi sur l’autonomie des universités. Nous n’avons pas participé aux discussions dites de concertation car nous pensons qu’il n’y a rien à amender. L’objectif de votre projet est de casser le service public d’enseignement en transformant les universités en unité entrepreneuriale et managériale.

4 points nous semblent essentiels pour assurer une formation universitaire de qualité pour les étudiants, pour permettre aux personnels de travailler dans de bonnes conditions et pour favoriser la recherche.

1. Le fonctionnement démocratique de l’Université doit être amélioré

Il faut que les choix scientifiques et pédagogiques soient élaborés, par les personnels et étudiants concernés au sein des UFR ; puis par les élus aux trois conseils d’Université (CS, CEVU et CA), de manière à ce que des débats contradictoires puissent y avoir lieu.

Les choix scientifiques et pédagogiques ne peuvent être confisqués par un Conseil d’Administration réduit et fortement élargi à des personnalités extérieures, pas plus que par un président, devenu chef d’entreprise. Ce nouveau mode d’organisation et d’administration risque fort de voir se développer une « gouvernance » totalitaire des universités.

Nous réfutons aussi le renforcement du poids des personnes extérieures, en particulier des représentants « du monde économique et des entreprises », dont les intérêts et objectifs (livrer l’université à la marchandisation, rentabilité, vues à court terme) sont antagonistes avec les missions de l’université. (article 8)

Nous contestons aussi la place réduite des étudiants et des IATOSS dans un CA amaigri et dominé par un super président.

Annulation des articles : 2, 3, 4, 5, 6 (véto sur recrutement), 8, 9 et 10 (rôle consultatif du CEVU et du CS)

2. La recherche doit être réellement indépendante

L’article 57 de la loi de 1984 affirmait la « pleine indépendance et l’entière liberté d’expression » pour les enseignants-chercheurs en recherche comme en enseignement.

Les orientations de recherche d’un enseignant-chercheur ou d’un chercheur ne peuvent être imposées ni par le président d’une Université, ni par une agence de moyens, dont les projets et programmes sont prédéterminés, ni par une agence d’évaluation, ni par les comités des organismes de recherche existants comme c’est acté dans votre projet. . Les organismes de recherche (universités, grands organismes) doivent être multiples aussi.

Les universités, parents pauvres de la recherche, doivent être dotées de moyens publics considérablement plus élevés que ceux qu’elles reçoivent actuellement.

Le projet d’autonomie accordera des moyens nouveaux aux universités qui s’engageront dans l’option ce qui augmentera les inégalités entre les universités. Mais notre opposition n’est de réclamer le même régime pour toutes les universités. L’autonomie sera de fait réclamée par toutes le universités désireuses d’avoir des moyens nouveaux grâce aux nouveaux CA nommés dans les 6 mois.

3. L’enseignement universitaire doit permettre à chacun d’accéder à un formation de qualité et émancipatrice

Nous voulons réafffirmer l’exigence de la qualité d’une formation généraliste ou spécialisée dispensée par des enseignants-chercheurs recrutés par les seuls pairs. Cette formation ne doit pas être encadrée dans une soi-disante mission d’insertion professionnelle.

Il faut au contraire, des formations généralistes de qualité avec des diplômes nationaux et non limitées aux besoins des bassins d’emplois locaux. Nous demandons donc l’annulation de la mission d’insertion professionnelle dans l’article L123-3. En revanche, nous souhaitons voir rappeler la mission de recherche pour la construction de connaissances sur le long terme.

Nous voulons aussi une possibilité réelle de formation à l’université quel que soit l’âge des étudiant-e-s. Ainsi les chômeurs doivent pouvoir se former à l’université sans perdre leurs droits au chômage.

Nous refusons toute inégalité des frais d’inscription. Ceux-ci doivent être fixés annuellement par arrêté par le ministère de l’Enseignement Supérieur et le texte de loi doit préciser cette garantie.

Nous refusons toute sélection à l’entrée de l’université. Or, l’article L612-3 introduit désormais une condition : l’étudiant doit se soumettre à un dispositif d’orientation préalable. Nous demandons l’annulation de cette modification.

Nous refusons toute sélection à l’entrée du master. Toute politique de sélection décidée par le CA entraînera une réduction des effectifs et de fait une sélection sociale risquant d’exclure les étudiants salariés ou rencontrant des difficultés financières. Nous demandons l’annulation de la modification.de l’article L.612-6.

4. Contre la précarité il faut des créations de postes

Les universités sont actuellement les plus gros employeurs de personnels précaires. Nous demandons la création de postes de fonctionnaires pour résorber définitivement la précarité, et la titularisation des salariés CDD actuels à l’université.

Nous refusons le recrutement direct de personnels quels qu’ils soient par les établissements, même sur contrat à durée indéterminée, car il remet en cause le recrutement sur concours, favorise le clientélisme, entraîne des inégalités de traitement et par suite la casse du statut de fonctionnaire d’état.

Nous refusons le recrutement de chercheurs (« agents contractuels sur des emplois scientifiques ») par l’université car ce sera forcément sur contrat.

Pour garantir l’indépendance des enseignants-chercheurs et pour éviter tout arbitraire ou clientélisme, toutes leurs missions et la « répartition de leurs obligations de service », doivent rester fixées dans leur statut par la loi et non modulées par le Conseil d’Administration ou le président de leur université. Nous sommes contre toute prime au mérite octroyés par le président.

Pour les mêmes raisons, les universités ne doivent fixer des obligations de service d’enseignement aux chercheurs.

Enfin, pour dynamiser la recherche à l’université, nous revendiquons une réduction drastique des activités d’enseignements et d’administration pour les enseignants-chercheurs avec un service d’enseignement de 120h équivalent TD/an pour tous. Cela passe par la création d’emplois d’enseignants-chercheurs et de personnels administratifs et techniques.

Le recrutement des enseignants-chercheurs doit se faire sur des bases objectives de qualité de recherche et de pédagogie. Actuellement, en violation avec l’article 57 de la loi de 1984 sur l’indépendance de recherche dont jouissent les EC, les considérations d’appartenance à une composante (laboratoire,...) sont presque systématiquement exposées sur les fiches de postes. De telles pratiques s’opposent à l’objectivité et à la qualité du recrutement. Elles favorisent un clientélisme mandarinal qui tend à écraser à l’entrée l’originalité et l’autonomie pourtant nécessaires à la recherche et à l’enseignement.

Nous demandons le maintien des commissions de spécialistes mais elles doivent être ré-élargies de 20 à 40 membres, avec une proportion importante d’universitaires extérieurs à l’université où le poste est ouvert. Une commission de spécialistes doit pouvoir être réunie de manière extraordinaire pour le remplacement en urgence des postes vacants. Il faut donc annuler l’article L952-6-1 du projet de loi sur les comités de sélection.

En conclusion, ce n’est pas en reportant d’une semaine la présentation du projet en Conseil de ministres que vous éteindrez les braises qui commencent à s’allumer : il faut le retirer et engager de vraies discussions."


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