Déclaration liminaire du syndicat SUD Éducation Alsace à la CAPA « notation, liste d’aptitude, hors classe et titularisation » du jeudi 23 mars 2016

vendredi 24 juin 2016
par  sudeducationalsace
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Les commissaires paritaires SUD Éducation le disent et le répètent à toutes les CAPA qui concernent la notation ou l’avancement des carrières : notre syndicat est opposé à toute forme de notation des personnels et à tout avancement différencié qui tend à établir une hiérarchie entre collègues. Nous refusons un système de notation qui laisse, quoi qu’on en dise, une grande place à l’arbitraire. La notation administrative annuelle, qui s’appuie sur des critères pour le moins flous, n’a souvent que peu de sens pour les premiers concernés. Pire, elle est utilisée par certains chefs d’établissement comme une arme leur permettant de régler leurs comptes avec des enseignants un peu trop contestataires. La notation pédagogique, quant à elle, évolue au gré d’inspections irrégulières et trop souvent infantilisantes qui laissent parfois les inspectés dans des situations de souffrance au travail qu’on ne peut pas accepter. Et si les collègues de l’académie ne contestent que peu leur notation administrative (seulement neuf contestations cette année) ou des rapports d’inspection parfois truffés d’erreurs factuelles et d’inexactitudes, c’est simplement qu’ils ne prennent pas au sérieux ce mode d’évaluation. Cette notation fort arbitraire sert ensuite de mesure à un système d’avancement totalement absurde, puisqu’il établit d’entrée que 30 % des collègues sont très méritants, que 50 % d’entre eux le sont un peu et que les 20 % qui restent sont si incompétents qu’on ne leur accorde qu’un avancement de carrière au ralenti. La promotion à la hors-classe n’est alors que le couronnement de ce système insensé et elle ne peut donc être qu’arbitraire, elle aussi. D’ailleurs, les 16 collègues à l’échelon 11 ayant reçu un avis défavorable de la part d’au moins une de leurs hiérarchies peuvent témoigner de la façon dont celles-ci utilisent les avis pour le passage à la hors classe comme de véritables sanctions. Pour toutes ces raisons, les commissaires paritaires de SUD Éducation Alsace ont choisi de boycotter le groupe de travail préparatoire à cette CAPA. En effet, ses travaux ne peuvent que structurellement déboucher sur des injustices flagrantes malgré toute la bonne volonté de ses participants. Si nous sommes présents aujourd’hui, même en ce jour de grève, c’est pour prendre acte des résultats et des méthodes utilisées et en informer les collègues.

Dans ce contexte, les annonces récentes du ministère ont, apparemment, tout pour nous satisfaire. Comme l’annonce d’emblée le dossier de présentation de cette réforme, les carrières seront désormais « mieux rémunérées et mieux accompagnées ». En effet, aux deux revalorisations du point d’indice programmées en en juillet 2016 et en février 2017, s’ajoutent deux augmentations indiciaires en janvier 2017 puis en janvier 2019, et un reclassement dans les nouvelles grilles en septembre 2017. Ces nouvelles grilles, justement, semble répondre à au moins une revendication syndicale de longue date : la suppression des rythmes d’avancement différenciés en fonction de la notation et la mise en place d’un avancement unique.

Cependant, ce nouveau rythme d’avancement se situera quelque part entre le le choix et le grand choix, et ne sera pas purement et simplement aligné sur le rythme d’avancement au grand choix, comme le demande SUD Éducation depuis bien longtemps. Et ce n’est là qu’un des nombreux arguments qui fait que le compte n’y est pas, malgré cette annonce qui apparaît opportunément en plein mouvement social de grande ampleur et à un an de deux élections décisives pour le gouvernement actuel.

D’abord, la mise en place de trois ou quatre « rendez-vous carrières » à échéances fixes, si elles permettront sans doute de réduire le caractère aléatoire des inspections, ne régleront pas leur problème fondamental : les collègues seront sans doute toujours évalués de la même façon. Cette réforme aurait pu être l’occasion de renoncer à l’évaluation des enseignants, mais ces « rendez-vous carrière » auront pour objectif principal de permettre deux « accélérations de carrières » aux 30 % d’enseignants les plus méritants (ce qui reconstitue simplement un « grand choix » qui ne dit plus son nom) puis le passage à la hors classe et à la toute nouvelle classe exceptionnelle. La création de ce nouveau grade pose, elle aussi, un certain nombre de problèmes. 80 % des promotions seront accordées aux collègues qui auront exercé au moins huit ans en éducation prioritaire ou auront occupé des missions particulières (directeurs d’école, DCIO, chefs de travaux, conseillers pédagogique). Ainsi, la création du statut de PFA (professeur formateur académique) qui ouvre droit à d’importantes décharges, une indemnités et un passage à ce nouveau grade, créera de facto une hiérarchie intermédiaire entre les « simples enseignants » (entendez, ceux qui se contentent de faire leur travail du mieux qu’ils le peuvent) et les IPR. Par ailleurs, nous ne savons pas sur quels critères seront évalués les 20 % d’ « enseignants méritants » qui accéderont aussi à ce grade sur des critères qui ne pourront qu’être arbitraires. Comme l’écrit très bien François Jarraud dans un article paru sur le Café Pédagogique : « Aujourd’hui, pour les PE et certifiés, l’écart entre l’échelon le plus faible et le plus élevé est de 434 points. En 2020, 582 points sépareront les débutants des « meilleurs ». » SUD éducation Alsace dénonce la création de ce nouveau grade qui ne fera que hiérarchiser les carrières enseignantes et ne pourra que renforcer les effets de cour autour des IPR et des chefs d’établissement. Contrairement au ministère, nous ne considérons pas que les collègues sont des ânes qu’il convient de faire courir après une carotte.

Si on élargit notre perspective, on peut ajouter que ces progrès dans l’amélioration du traitement des enseignants ne compenseront pas les six années de gel du point d’indice dont nous sortons timidement. En outre, nous pouvons parier que cette réforme se fera « à moyens constants » : le milliard d’euros qui servira à la mettre en place sera sans doute prélevé sur d’autres budgets étatiques tout aussi importants que celui de l’éducation. Enfin, ces annonces s’inscrivent dans l’accord PPCR qui a été signé par des organisations certes majoritaires dans l’Éducation nationale mais minoritaires dans la fonction publique et qui n’a pu être mis en place que par un passage en force gouvernemental. On comprend dès lors qu’il faille chouchouter ces bons élèves même si les contreparties de ces timides avancées seront des carrières ralenties dans d’autres corps de la fonction publique et une mobilité des agents accrue en plus de toutes les réserves que nous venons d’émettre pour les corps enseignants. Et c’est sans compter sur le fait que cet accord s’étend sur la prochaine mandature, ce qui rend son application plus qu’incertaine. C’est pourquoi ces annonces ne feront pas regretter à SUD Éducation Alsace la non-signature de ce protocole par Solidaires fonction publique et que, plus que jamais, nous appelons les collègues à être vigilants et à se défendre, individuellement et collectivement, contre les abus hiérarchiques dont ils sont victimes.


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