La crise de l’école. Article paru dans Alternatives Economiques (février 2010)

mercredi 24 février 2010
par  sudeducationalsace
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La crise de l’école

Par Guillaume Duval, rédacteur en chef d’Alternatives économiques |

Article Web - 18 février 2010


"Si l’école est en crise, comme l’illustrent actuellement les grèves des professeurs, cela résulte en grande partie d’un simple choix budgétaire, qui se traduit par une baisse de la part des dépenses d’éducation dans le PIB.

Ces derniers jours, l’école a été à la une des médias avec une série d’incidents en matière d’insécurité. Ces problèmes illustrent un malaise plus profond et traduisent la dévalorisation de l’institution scolaire. Celle-ci a en effet cessé d’être une priorité tant pour la société que pour ceux qui nous gouvernent.

Que l’insécurité s’accroisse dans les collèges et les lycées n’est pas vraiment surprenant : en 2004, l’Education nationale employait encore 50 000 personnes pour y assurer la « surveillance » sous différents statuts, aujourd’hui, ils ne sont plus que 28 000, quasiment moitié moins… Mais ce qui se passe sur ce plan ne fait qu’illustrer un désinvestissement plus général. La part des richesses produites chaque année, le fameux produit intérieur brut (PIB), consacrée à l’éducation était de 7,6 % en 1996.

En 2008, elle n’était plus que de 6,6 %, en baisse une fois de plus par rapport à 2007.

Nicolas Sarkozy veut réduire la part des dépenses publiques dans le PIB. En matière d’éducation, c’est déjà le cas chaque année depuis près de quinze ans…

Les conséquences des coupes budgétaires

1 point de PIB en moins, cela paraît très abstrait.

Cela veut dire en fait qu’il manque 20 milliards d’euros au budget de l’Education pour que l’effort de la nation soit équivalent à ce qu’il était en 1996. 20 milliards en moins sur 129, c’est un trou de 15 %, il manque un euro sur six.

Ces 20 milliards représentent plus de dix fois ce que l’Etat dépense chaque année pour son action à l’étranger ou encore deux fois ce que dépense le très grand ministère de Jean-Louis Borloo pour l’écologie, le développement et l’aménagement durables…

Cela se traduit par des reculs majeurs : en 1996, 84 % des jeunes de 18 ans étaient scolarisés, aujourd’hui on est redescendu en dessous de 80 %.

Et à 20 ans, la chute est encore plus prononcée, de l’ordre de 6 points… Tandis que 150 000 jeunes sortent toujours du système scolaire sans aucun diplôme.

L’école française apparaît en outre dans les comparaisons internationales comme médiocre, parmi celles qui reproduisent le plus les inégalités sociales.

Investir dans l’avenir

Ces difficultés ne relèvent évidemment pas seulement de questions de moyens. Les racines du mal sont complexes et profondes. Il n’empêche, il n’existe aucune possibilité d’améliorer les choses dans un contexte d’austérité budgétaire accrue. Or l’école reste la principale cible des politiques de maîtrise des dépenses de l’Etat.

En 2010, sur les 30 000 suppressions d’emplois publics programmées par le gouvernement, 16 000, soit plus de la moitié, sont prévues dans l’éducation.

Avec des conséquences absurdes, comme la réforme de la formation des enseignants. On va les recruter un an plus tard et les envoyer faire cours sans qu’ils aient suivi quasiment aucune formation pédagogique ni stages pratiques.

Simplement parce que cela permettra d’économiser quelques milliers de postes…

Ces aberrations illustrent un contresens total sur la notion d’« investissements d’avenir » régulièrement mise en avant par le gouvernement : il vient en particulier de lancer une (coûteuse) campagne de communication pour justifier le « grand emprunt ».

Celui-ci « n’est pas une dépense courante, affirme cette campagne. C’est un programme qui financera des investissements dans des secteurs d’avenir… ». Mais cette distinction entre « dépenses courantes » et « investissements d’avenir » n’a plus aucun sens dans nos sociétés.

L’investissement a cessé en effet depuis longtemps de s’y mesurer en tonnes d’acier et de béton.

En s’attaquant en priorité aux dépenses d’éducation, censées n’être que des dépenses courantes, le gouvernement hypothèque au contraire lourdement l’avenir de notre société et de notre économie.

Retrouvez la chronique de Guillaume Duval sur France Inter ici"

source : http://www.alternatives-economiques.fr


 

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