Sans-papier, la lutte continue

jeudi 3 septembre 2009
par  sudeducationalsace
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La protection de l’enfance bafouée

Le 8 juillet 2009, la France se faisait rappeler à l’ordre par le Comité des Droits de l’Enfant de l’ONU pour la non-application de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant (CIDE), qu’elle a pourtant ratifiée voilà 19 ans. Sujet : le mauvais traitement des mineurs étrangers isolés (dont le nombre est estimé à 10 000) qui ne sont ni accueillis ni protégés. Cette même commission aurait pu ajouter à la liste tous ceux retenus en zone d’attente dès leur descente d’avion, même s’ils sont seuls et âgés d’une dizaine d’années (1092 mineurs en 2008 rien que dans la zone d’attente de Roissy), ou encore ceux qui, dès leur plus jeune âge, sont enfermés avec leurs parents en centre de rétention administrative (CRA) pendant de longues semaines.

La politique à l’égard des migrants piétine chaque jour davantage les droits humains fondamentaux, sépare les familles (voir la conférence de presse du Réseau Éducation Sans Frontière — RESF — sur les familles démembrées), broie les êtres, en France comme en Europe.

L’Europe forteresse

Depuis l’adoption par l’UE de la Directive « retour » (juin et décembre 2008) et du pacte européen sur les migrations en octobre 2008, censé gérer les flux migratoires, la politique répressive à l’égard des migrants ne cesse de s’accentuer à défaut de pouvoir empêcher les hommes de se déplacer pour construire un avenir meilleur (2500 d’entre eux au moins ont péri aux portes de l’Europe l’an passé). Le budget de l’agence FRONTEX, chargée des contrôles aux frontières extérieures, a doublé entre 2007 et 2009, en même temps que les dépenses liées aux expulsions ont été multipliées par six (J.O de l’UE mars 2009). Le fichage européen des empreintes conduit maintenant nombre de migrants, principalement dans la région de Calais, à se mutiler les doigts afin de ne pas être renvoyés dans le premier pays traversé en entrant en Europe (accords Dublin II). L’Italie promulgue des lois raciales contre les migrants, la Grèce laisse pourrir des milliers d’entre eux dans ses geôles alors que le député européen britannique Nick Griffin a, lui, trouvé la solution pour éviter l’invasion de tous ces clandestins : couler leurs bateaux en pleine mer ! (voir sa déclaration à la BBC le 08/07/09.)

La France, « bonne élève »

Si l’Europe des 27 a reçu, en 2008, 240 000 demandes d’asile et en a rejeté 73%, la France, bonne élève, en a rejeté 84% (sur 27 000). Elle a enfermé dans le même temps 35 000 personnes en centre de rétention administrative (CRA), en a construit trois nouveaux, agrandi un quatrième, reconstruit un cinquième qui avait brûlé et Hortefeux a dépassé les objectifs chiffrés des expulsions (29 796 pour 28 000) ! Les techniques de fichage des individus — migrants compris — et de contrôle de la population se sont multipliées : Fichier Eloi, Fichier Edwige, logiciel DN@ (pour la gestion des CADA, centres d’accueil pour demandeurs d’asile), passeport biométrique, tests ADN et transmission automatique des cartes des demandeurs d’emplois étrangers des Pôles Emplois en direction des préfectures. Mais contrôler tout le monde ne suffit pas, il faut aussi réduire au silence les récalcitrants.

On bosse ici ! On vit ici ! On reste ici !

Donc, on poursuit les aidants pour délit de solidarité, en application de l’article 622-1 du CESEDA (code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, voir la pétition). Et on remet en question l’intervention de la Cimade (comité inter-mouvements auprès des évacués) dans nombre de centres de rétention (voir la pétition « Les droits des étrangers ne peuvent se réduire à un marché »).

Un arbitraire débridé

Après l’explosion des grèves de travailleurs sans-papiers au printemps et à l’été 2008, qui ont permis, en Ile-de-France la régularisation d’environ deux mille personnes, le mouvement a marqué une pause. Les luttes ont été longues et dures ; les confédérations n’ont pas toujours soutenu les équipes locales et le mouvement ne s’est pas étendu à la province. Quant au gouvernement, ordre a été donné aux préfectures de ralentir les procédures de régularisation, de les complexifier et de multiplier les embûches administratives. Depuis le début de cette année, peu de nouvelles luttes en entreprises ont démarré et les régularisations tardent à venir alors que les obligations de quitter le territoire (OQT) pleuvent.

Côté associations, les demandes pour motif de vie privée et familiale sont de plus en plus difficiles à obtenir ou transformées en régularisation par le travail, dans le but d’inverser — artificiellement — la parité immigration de travail/immigration familiale.

Depuis un an le ministère de la rafle et du drapeau multiplie circulaires, notes de services, télégrammes (voir celui du 15/12/08) qui se superposent et s’entrecroisent, amplifiant encore plus, si cela était possible, le caractère discrétionnaire des régularisations.

Les critères cumulatifs requis pour les cartes salarié et vie privée et familiale connaissent une croissance exponentielle inversement proportionnelle au nombre de régularisations.

Un rapport de force à inverser

Quel que soit le champ d’intervention — entreprise, établissement scolaire, maladie, asile, droits de l’Homme, etc. — toutes les associations et syndicats investis dans la lutte pour les sans-papiers connaissent les mêmes difficultés. Dans quelques départements de la région parisienne (75, 93, 94) existe depuis quelques mois un travail en commun entre organisations syndicales, associations et collectifs de sans-papiers, avec des configurations différentes suivant les réalités locales. Ces coopérations, parfois difficiles, sont cependant indispensables pour inverser le rapport de force et permettre d’avancer vers la régularisation de tous les sans-papiers. C’est du reste le sens de la motion adoptée à l’unanimité au dernier congrès de la fédération Sud Éducation à Cherbourg : « Les syndicats Sud Éducation inciteront et participeront à une coordination horizontale entre les RESF locaux, les associations de défense des sans-papiers et les organisations syndicales investies dans ce domaine pour établir une réelle collaboration, échanger informations et stratégies, et faire front commun face aux préfectures et aux ministères. »

Faisons front. Et en commun !

Commission Immigration Sans-Papiers

 

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